mardi 12 septembre 2017

Cours n° 43 La BD de reportage 1 : un mauvais genre consacré



Si Michel-Ange avait vécu aujourd'hui, 
n'aurait-il pas fait de la BD ?




Progression semestrielle prévisionnelle



Textes théoriques sur la BD de reportage

Oeuvres étudiées
Thèmes et propos abordés
Exercices, travaux pratiques,
Réalisation graphique…
1

Un phénomène récent.


Un mauvais genre consacré

Le Sacre de la Bd-reportage (Gallimard, revue Débat).

 La « BD de non fiction » par  Benoît Mouchart (2000-2017 la mutation de la bande-dessinée), par David Vandermeulen… (la transmisssion du savoir)
Précurseur 1

Le Photographe de Emmanuel Guibert
Le 9ème art , un mauvais genre consacré.

Une écriture spécifique…

Roman graphique, BD de reportage, Bd documentaire.

Une vignette (ou case) et pour illustrer une micro-bio

Le matériel minimal.

L’économie de moyen.


2

Les continuateurs du photographe.

Un Tintin non fictif


Comparaison du 9ème art avec les autres médiums (Théâtre, cinéma, photo)


Blog : les "coinceurs de bulles".


Henri Cartier-Bresson, Allemagne, 1945 de Morvan et Savoia
&
Clichés de Bosnie de Ducoudray et Ravard

Le nouvel héroïsme.


La concurrence photo-journalisme et dessin


Une vignette d’après photo


Le manifeste de la BD de reportage. 


L'appel de Joe Sacco. 
Textes d'introduction de Joe Sacco aux albums Palestine et Reportages

"Manifeste, quelqu'un ?" 

Palestine

Reportages de Joe Sacco
Le précurseur, l’aventure, le terrain, l’engagement. 

Documentaire ou reportage… graphique ?


Usage de la couleur (le coloriste)

La vignette et le croquis d’après nature.




D'un manifeste l'autre.

Du petit XXème à la revue XXI. 


De nouveaux médias pour un un nouveau journalisme



Le "Manifeste de XXI" et l'Avant-propos de Reportages  : le point de vue de Saint-Exupéry

Les principes du journalisme graphique.


Reportages, les auteurs de XXI

Hippolyte et Saint-Exupéry, La Fantaisie des dieux.
Les continuateurs de Joe Sacco, Guibert et Stassen. 


Stassen, l'anti-Tintin

Hippolyte, un Tintin, produit par XXI
La bande ou le strip.

Rapport-texte et image

Les bulles et les commentaires.


5 la conquête de légitimité en toute humilité

Lisa Aucquier

« Comment la BD média hautement subjectif gagne-t-elle sa légitimité dans le monde documentaire ? »



Guy de Lisle

Pyongyang

Chroniques de Jerusalem


La subjectivité, la mise en scène de soi, la mise en abyme, le métalangage critique…


Une planche en 3 bandes

La composition.

Intégrer une photo à la manière de Guibert et Hyppolite


Des échos de Davodeau à Taipei.


l'Avant-propos de Rural 




L’universel et le particulier

La préface de Yvan West Laurence, rédacteur en chef d’Animeland

Rural 

les Ignorants 

Le Chien qui louche


Mes années 80 (80年代事件蒲) de Sean Chuang (小莊

Préparation à l'entretien avec Chen Mei, traductrice de Davodeau à Taiwan




Angoulème

Les mooks et le marché éditorial

Une planche en 3 bandes : 1°jet/ 2° jet.

Gommer-
recommencer.


7 Première rencontre : Cheng Chen-Mei

Une interview
8 Le paysage et l'environnement


L'écologie d'après nature.
La série d’été du Monde sur la « BD entre en politique »

1 – La BD entre en politique : les bulles explorent leur temps

2 – La BD entre en politique : l’histoire de France dépoussiérée

Un printemps à Tchernobyl d’Emmanuel Lepage.

Saison brune de Squarzoni

Rural  de Davodeau


Réflexion sur l’actualité : l’écologie d'après nature

Le portrait. Vs la caricature.

"ne pas faire rire" Lepage.


L’écriture à quatre mains.
9 l’analyse politique vulgarisée
La série d’été du Monde sur la « BD entre en politique »
3 – La BD entre en politique : les intellectuels consacrent (enfin) le 9e art
4 – La BD entre en politique : bédéastes à bâbord
5 –  De Matignon à Marine Le Pen, la BD entre en politique

Quai d’orsay de Blain et Lanzac

Le Château de Mathieu Sapin
Réflexion politique :  au plus près des hommes politiques


Le nouveau couple reporter-dessinateur
Le concept et la narration.

Le story-board

Et

Le scénario



10 le travail de reconstitution

La représentation graphique de la guerre et de la violence extrême
Lucie Servin, "La mémoire de la Shoah et sa représentation en BD", Le sacre de la bande dessinée, in Le Débat, n° 195, Paris, Gallimard, mai-août 2017, p. 188-198.


Didier Pasamonik & Joël Kotek, Shoah et Bande dessinée, Denoël Graphic & le Mémorial de la Shoah

Maus de Art Spiegelman

Déogratias de Stassen
 (Stassen)

La terreur blanche taïwanaise
(Lin Li-Chin)

Le joug japonais
Sadeeq Bale
L’histoire . la guerre en particulier

La BD et le trauma

La représentation impossible
Représentée
Projet de
Caractères animés


11 Le style traditionnel, créatif, naïf, réaliste, etc.

un travail d’équipe au sein d’une rédaction
L’universel et le particulier.

Ann Miller "Citizenship and City Spaces" in Bande dessinée as reportage.
in 

History and Politics in French-Language Comics and Graphic Novels, edited by Mark McKinney

Le printemps des Arabes de Jean-Pierre Filiu et Cyrille Pomes

L’Arabe du futur de Riad Sattouf


Histoire individuel et grande Histoire. 
Le style graphique, la ligne claire etc.
12 Deuxième rencontre : Sean Chuang 小莊

Taiwan à Angoulème
Le sacre de la bande dessinée, in Le Débat, n° 195, Paris, Gallimard, mai-août 2017
Une interview

13 le dessin et les nouvelles technologies

Article du Monde : « La BD, une idée fixe pour le cinéma ». 

Persépolis de Marjane Satrapi

Ainsi se tut Zarathoustra de Nicolas Wild
Un genre hybride…


Roman graphique : du papier à l’écran…

Deux BD sur l’Iran.
Et les nouvelles technologies (tablettes, logiciel, etc)

Invité :

Xavier Mehl, journaliste et dessinateur.

14 la BD et le cinéma
La Bande dessinée et l’animation.

Marjane Satrapi. Persépolis.
15 La BD reportage au Japon

Jean-Marie Bouissou « Le manga en douze questions »

Gen d’Hiroshima

Les 3 Adolfs

L’influence du manga

Planches- patron pour manga.
16 La BD reportage à Taiwan

Le ton du reportage (sérieux, comique, etc.)
Le récit de voyage et la BD.
Golo, Made in Taiwan, I & II.
La caricature. le comique des comix…

Travail du portrait.

Travail de l’expression et du mouvement.

17 La BD reportage à Taiwan

Les mooks, renouveau du journalisme, L'Harmattan, 2017
« petit-fils d’Algérie » de Joël Alessandra et

les carnets de Delacroix
Le récit de voyage et la BD.

17  Troisième rencontre


18 Bilan & synthèse
Évaluation finale
Perspective de stages
Publication sur Asialyst ? Soit une petite BD de reportage Soit une série d’interview de dessinateur taïwanais + quelques strip pour illustrer



Littérature appliquée au journalisme : La BD de reportage et le documentaire graphique (1er semestre)


Cours n°1 Un phénomène récent. Un mauvais genre consacré. Artification de la BD


Principe du cours de littérature appliquée au journalisme : théorie (cours, textes de réflexion, méthodologie, évaluation) & pratique (stage, interviews, création).

- Il s’inscrit dans le cadre d’une progression sur la littérature appliquée au journalisme (sémiologie & médiologie, journalisme littéraire et grands écrivains reporters)
- Les stages supposent des collaborations avec des journaux (BFT, Asyalist par exemple)


Cours n°1


Un numéro de la revue Débat a été consacré récemment à l’événement de la Bande-dessinée, appelé aussi 9ème art.

Pendant longtemps la BD a été considérée comme un genre mineur, vulgaire, un « mauvais genre ». L’émission de France-culture intitulée « mauvais genre » qui s’intéresse à tous les genres populaires y a consacré par exemple quelques émission. En voici une : https://www.franceculture.fr/emissions/mauvais-genres/bdpolar

Pour quelles raisons la BD est-elle restée longtemps ostracisée ?

C’était un genre réservé surtout aux enfants et aux adolescents… (spectre qui va des albums pour enfants à la BD de SF)  Il existait une « Bd pour adultes » mais celle-ci ne concernait presqu’exclusivement que la BD érotique… Le genre touche ici au tabou de la sexualité…

Ce qui veut dire que la BD était considérée comme un genre non sérieux, loin des palmes académiques des genres nobles de la représentation (peinture, sculpture, cinéma, etc.) qui ont longtemps eux-mêmes été soumis à une hiérarchie comme celle des Beaux-arts. Sous l’ancien régime les sujets mythologiques, historiques, portraits, considérés comme supérieurs aux genres tels que les « scènes de genre » qui représentaient des scènes de la vie quotidienne (cf. Chardin). À l’époque moderne, les hiérarchies ont été bouleversées, l’avènement de l’abstraction a projeté les représentations figuratives, analogiques du réel en bas de l’échelle des arts graphiques. Dans ce contexte, savoir dessiner d’après nature, un motif quelconque était et reste encore méprisé.

La « bande-dessinée de reportage » prend à revers ces deux systèmes de valeurs car 1 – on pourrait la considérer comme un héritière de la scène de genre (propre à l’ancien régime) 2 – aussi créative et destructurée soit-elle, elle repose sur un effort de représentation analogique qui exclut l’abstraction.  

Aujourd'hui, la BD répond à sa propre axiologie esthétique. Comme signe de son avénement , elle figure parmi les beaux-arts au 9° rang d'où le "9° art" (cf. supra)

Cette revanche de la BD, cette recherche de reconnaissance et cette réflexion autour de sa place dans la hiérarchie des genres artistiques a été récemment incarné par un album Le Chien qui Louche de Davodeau, traduit à Taiwan.

N'est-ce pas plus un désir qu'une réalité ? Certes Tintin a un musée en Belgique. Mais aucune planche ne figure vraiment aux côtés d'artistes contemporains. 

Malgré tout, depuis quelques années (décennies même ?), la BD acquiert des lettres de noblesse et dans ce grand mouvement de reconnaissance… on peut dégager en particulier deux tendances, le roman graphique d’un côté, et la BD de reportage de l’autre, lesquels sont parfois confondus.

Nous allons consacrer ce cours à la deuxième partie. La BD de reportage, distinguée aussi parfois du « documentaire graphique », nous verrons ce qui justifie ces deux appellations.  


I – Un texte critique : un mauvais genre consacré.


« Le Sacre de la Bd-reportage » (Gallimard, revue Débat). La « BD de non-fiction » par  Benoît Mouchart (2000-2017 la mutation de la bande-dessinée), par David Vandermeulen… (la transmisssion du savoir)

a – Un article du Monde lui est consacré : « La BD entre en politique : les intellectuels consacrent (enfin) le 9e art ».

La revue « Le Débat » consacre un numéro spécial à la bande dessinée et tente, à travers de nombreuses analyses, de saisir un tel succès.

Retenons quelques moments forts de l’analyse :


b – Revue Débat : La « BD de non fiction »
« 2000-2017 : les mutations de la bande dessinée » par  Benoît Mouchart (2000-2017 la mutation de la bande-dessinée)

Retenons quelques moments forts de l’analyse :

p 78 : parmi les raisons que cite l’auteur du succès de la BD : il y a « l’émergence de la non-fiction ».

L’influence de l’anglais est ici à noter. De même que l’appellation roman graphique pour désigner des bandes dessinées de long format vient de graphic novel.

p 78 : une universalité inquiétante : « Ces mutations soulèvent autant d’enthousiasme quel suscitent d’inquiétude. Parce qu’elle s’appuie sur la lisibilité universelle des images – identiques pour toutes les communautés humaines –, insensibles aux frontières physiques comme aux barrières linguistiques, la bande dessinée s’est imposée en un peu plus d’un siècle d’existence comme l’une des expressions artistiques les plus riches, les plus innovantes et les plus globales qui soient ».

Il faudra s’interroger plus longuement et plus précisément sur cette question apparemment évidente de l’universalité de l’image. Toute image est-elle vraiment compréhensible par tous ? Toute BD de reportage est-elle traductible dans toutes les langues ?

p. 79 : essor du 9ème art : « en 2016, le secteur représente 14 % du chiffre total de l’édition ».

p. 80 : une spécificité française : « On compterait en France près de 1597 auteurs – une situation unique au monde qu’il convient de protéger. »

Au fait quelles sont les 8 autres arts ? D’où vient cette hiérarchie ?

p. 80 : de nouveaux formats : « Dans les années 2000, le monopole du standard traditionnel de l’album cartonné de 48 pages en couleurs a faibli au profit d’autres formats, plus souples, moins chers et souvent imprimés en noir et blanc ».

p. 81 : aberration commerciale ? : « C’est le temps d’une utopie : donner à la bande dessinée le format d’un roman pour lui permettre de rejoindre les librairies généralistes et d’atteindre ainsi un public adulte ».

p. 82-3 : la marge reconnue et la « nouvelle BD » : « Les portes des éditeurs traditionnels se sont peu à peu ouvertes à de nombreux artistes issus des structures alternatives ».

Le fait que la BD viennent d’une culture « underground » ou alternative a des implication esthétique et philosophique qui ne sont pas anodines et qui peuvent provoquer des résistances.

p. 83 : féminisme graphique : « Fait réjouissant contemporain de l’ascension du roman graphique, la bande dessinée suscite davantage l’intérêt des lectrices et des créatrices. »


p. 84 : sujets inspirés du réel : « La bande dessinée est par ailleurs de plus en plus propice aux témoignages et au reportage, à travers des œuvres qui déchiffrent le monde, pour tenter de le comprendre dans ses différences et ses diversités. (…) Le documentaire est même devenu un genre de bande dessinée au même titre que le polar, la SF ou l’heroic fantasy : il figure depuis 2016, sous l’intitulé « non fiction », parmi les segments du marché identifiés par le cabinet d’études gfk ».

p. 85 : les mangas en France, un cas à part : « Véritable signe de distinction générationnelle, les mangas représentent pour la jeunesse des années 2000 un phénomène de pop culture mondiale, tout comme le rock avait pu l’être dans les années 1960 et 1970 ».

Évidemment, c’est un lieu de rencontre avec Taiwan.
p. 87 : un média hybride : « Au moment où la civilisation de l’imprimé se voit bousculer par celle de l’écran, la bande dessinée marque à la fois un trait d’union entre l’image et l’écrit, mais aussi entre les traditions anciennes, actuelles et futures ».

Je minimiserais un peu la fonction du numérique dans la mesure ou une revue comme la revue dessinée, conçue au départ pour le web est finalement parvenu à percer grâce au papier.

p. 88 : médium du futur : « Nous sommes entrés dans l’antichambre de formes en devenir, dont nul ne peut encore deviner l’évolution. »



II – un précurseur de la BD de reportage : le Photographe d’Emmanuel Guibert.

Parmi les œuvres précurseurs de BD de reportage (ou de BD documentaire, le Photographe, de Guibert, Lefèvre et Lemercier, publié en 3 volume (2003-2004-2006), est sans doute la plus emblématique de l’effort d’écriture spécifique du genre.

Le Photographe de Guibert Lefèvre Lemercier


Que le « photographe » apparaisse comme le héros de l’histoire (non-fiction) racontée ici, n’est pas anodin. Nous comparerons la semaine prochaine ce volume avec quelques continuateurs. Notamment :  

1 – Cartier Bresson, Allemagne 1945 de Morvan et Savoia.
2 – Clichés de Bosnie de Aurélien Ducoudray et François Ravard.

Les deux albums mettent dans les deux cas en scène quoique de manière radicalement différente un photographe-reporter.

On pourrait se demander à la lecture de ses volumes, si une BD de reportage n'est peut-être pas tout simplement une BD dont le personnage est un reporter. Le héros est un reporter. Il faudra analyser d’un peu près en quoi consiste ce nouvel héroïsme.

Question 1 : En quoi consiste ce nouvel héroïsme ?

Ça paraît logique. La posture subjectiviste des BD de reportage qui consiste à mettre l’accent sur la subjectivité (le regard, le point de vue, l’angle) du reporter au détriment de l’objectivité à l’égard des faits, exigence difficilement négociable du journalisme.

Mais
1 – ce n’est pas tout à fait le cas, sinon Tintin en serait une BD de reportage. Il faut au moins ajouter la « non fiction ».

2 – que le reporter soit un photographe est également révélateur. Ce fait nous oblige a posé une seconde question :

Question 2 : pourquoi et comment le dessin parvient-il à concurrencer la photo sur son propre terrain, le reportage (ou le documentaire) ?


Observons quelques planches pour répondre à ces questions.

- les planches 10 et 11 
- les planches 16 et 17
- les planches 120-121
- les planches 122-123

III – un exercice d’écriture graphique :


Matériel : un papier (un carnet à dessin), un crayon.

1 – se représenter dans une vignette (ou une case), c’est à dire une image dessinée délimitée par un cadre et écrire une mini bio.


Le croquis-reporter, l’auteur de BD-reporter, comme on vient de le voir, se met fréquemment en scène et il est amené également à signer un petite biographie

Un exemple avec 24 h 01 et la revue XXI.

http://www.revue21.fr/illustrateurs/

http://www.24h01.be/category/contributeurs/illustrateurs/


 2 – remarques : contrairement à la photographie et à d’autres médiums, la BD peut fonctionner avec très peu de moyens. Cette économie de moyen est ptécieuse pour définir le genre (même si l’arrivée des tablettes pour dessiner et l’usage de logiciel comme Photoshop ou Illustrator, suppose des outils informatiques élaborés).

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